Dans un grand entretien avec Sébastien Omont, paru ce mercredi 8 mars sur En attendant Nadeau, Marc Graciano évoque Le Grand Poème, dont la publication s’échelonnera en plusieurs livres à nos éditions Le Cadran ligné.
Extrait :
Vous avez publié aux éditions du Cadran Ligné deux livres courts, Le soufi et Le charivari. Ils font partie d’un projet que vous appelez Le Grand Poème…
J’ai commencé ce projet il y a déjà quelques années. Le sacret, publié chez Corti, en fait aussi partie. Je veux décrire la vie d’un homme de l’enfance à la mort. Après être devenu ermite, il souhaite fonder une maison-Dieu mais il se rend compte, par les expériences qu’il vit et par des rencontres, que la maison de Dieu existe déjà : c’est le monde qui l’entoure. Je suis sensible à cette idée que, si Dieu existe, il n’est pas une entité distincte qui aurait décidé de sa création, il est ce qui est, voire ce qui se fait. Llewelyn Powys, le frère de John Cowper Powys, parle de cette notion de matérialisme sacré dans Gloire de la vie et Souvenirs terrestres. Sa langue est à l’image de ce qu’il dit. Mon titre ne signifie pas que ce sera un grand poème mais que je revendique d’essayer de décrire ce qu’est la création, comme « poésie » en grec signifie « création ». C’est presque encore plus ambitieux !
À ce projet de Grand Poème, il y aurait une fin, mais j’ignore si je l’atteindrai parce que les textes publiés jusqu’à présent sont vraiment fragmentaires. Le charivari montre l’endroit où grandit le personnage ; Le sacret raconte une expérience fondatrice de son enfance ; dans Le soufi, un autre personnage vient le visiter, le gyrovague, qui lui-même fera plus tard le récit de ce qu’il a vécu en Terre sainte. L’année prochaine, paraîtront au Cadran Ligné deux petits récits jumelés dans lesquels on reviendra sur l’enfance du personnage : L’oiseleur et La nacelle, où il travaillera dans une pêcherie. On rejoint peut-être là le roman médiéval, avec des figures : l’oiseleur, le pêcheur…
Les extraits publiés ne suivent pas l’ordre chronologique de l’histoire du personnage : comment les choisissez-vous ?
Je termine un fragment quand j’arrive à développer des images qui me sont venues. Je vais ainsi m’associer à deux artistes. Dans l’exposition de Jan Kopp à la Maison Salvan près de Toulouse, des ronces traversent l’espace du Centre d’Art. Ça m’a intéressé car, dans Le Grand Poème, j’avais en tête qu’au moment où le personnage abandonnerait la construction de sa maison-Dieu, le bâtiment inachevé serait repris par la végétation. Cette collaboration me permet de mettre par écrit une image que j’avais déjà. De même, Antoine Picard a un projet où il photographie régulièrement un jardin, et mon ermite va créer un jardin. J’ai aussi publié dans la revue Muscle de Laura Vazquez un court texte dans lequel une bouvière ramène à l’ermite des objets du village du Charivari.
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La suite de l’entretien en suivant ce lien : https://www.en-attendant-nadeau.fr/2023/03/08/entretien-marc-graciano/
